Le Bois d’Inde
Appelé « Laurier aromatique » au 17e siècle par le R.P. Du Tertre, cet arbre n’a rien à voir avec le Laurier. S’il a été nommé ainsi, c’est par manque de formation botanique de la part du chroniqueur.
On a très peu de renseignements sur son origine. Les feuilles, le bois et les fruits de cet arbre de taille moyenne, étaient déjà connus bien avant la colonisation.
« Les Caraïbes ajoutaient ses feuilles dans toutes leurs sauces. » (R.P. Du Tertre). Les premiers colons Français l’utilisaient comme aromate : « On s’en sert communément dans les sauces, mais surtout quand on sale le cochon. On saupoudre de sel et de ces graines bien pilées toutes les couches de viande à mesure qu’on les arrange dans les jarres ou dans les barils, et on les couvre de feuilles sèches du même arbre, comme on fait en Europe des feuilles de Laurier. La viande ainsi accommodée contracte un goût et une odeur admirables. » (Père Labat).
Son bois était considéré au 17e siècle comme « le plus dur, le plus plein, le plus massif et le plus pesant de tous les bois du pays » (R.P. Du Tertre). C’est la raison pour laquelle on s’en servait pour faire des rouleaux de moulin, des dents de balancier, des rayons de roue et autres ouvrages. Le Père Labat préconisait d’en faire des planches, car selon lui, c’est un bois qui, paraîtil, se polit fort bien.
Aujourd’hui, le Bois d’Inde s’exploite très peu. Il est surtout utilisé en cuisine comme condiment, pour mariner le poisson et certaines viandes par exemple.
Une industrie originale
Ses feuilles contiennent une huile essentielle. Si on les distille dans du rhum, elles fournissent le « bay-rum », très utilisé dans nos îles il y a de cela une dizaine d’années. La fabrication du « bay-rum » fit naître une petite industrie locale. Ce produit était utilisé en frictions contre les refroidissements, et surtout par les sportifs pour leurs massages. Aujourd’hui, cette industrie a presque entièrement disparu, la plus grande partie de notre « bay-rum » vient des Antilles anglaises, de Sainte-Lucie notamment.
Nous ne connaissons pas l’origine du Bois d’Inde. Il se peut qu’il soit indigène. Les Piments, déjà consommés par les Caraïbes avant l’arrivée de Christophe Colomb dans les Antilles, sont originaires de l’Amérique tropicale, sans ou avec les Antilles (dans ce dernier cas ils seraient indigènes). Quant à la Cannelle, à la Muscade, au Gingembre et au Girofle, ils firent l’objet d’un commerce très actif au Moyen-Age entre l’Europe et l’Asie par l’intermédiaire des Musulmans. C’est en partie pour s’approvisionner directement en épices asiatiques que les Portugais et les Espagnols partirent à la découverte des océans au 15` siècle et que Christophe Colomb découvrit l’Amérique. Ces quatre épices eurent donc une importance considérable jusqu’au 16e siècle. Peut-être que les colons français les introduisirent pour concurrencer la production asiatique. Il est vrai toutefois qu’à partir du 17C siècle, d’autres produits tropicaux (Canne surtout) supplantèrent les épices, qui furent reléguées à un niveau secondaire dans le commerce entre l’Europe et les colonies.